L’aventure toujours, l’Islande en moins
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À près de 900 milles des côtes hexagonales, la réalité de la flotte n’a pas vraiment de similitude avec celle de la terre ferme. Là-haut, dans ce no man’s land au cœur de l’Atlantique nord, pas de canicule, de coup de chaud et de recherche désespérée de fraicheur. Le mercure culmine à peine à 12°C pour la flotte, celle de l’eau également et elle va continuer à chuter à l’approche de l’Islande. "Il fait froid, la pluie est froide et l’humidité prégnante… J’ai dû fermer ma véranda", s’amuse Arnaud Boissières (La Mie Câline). "C’est une ambiance humide avec de la brume, comme à Cherbourg au mois de janvier", poursuit Louis Duc (Fives - Lantana Environnement).
De fortes turbulences attendues
À cette baisse du mercure s’ajoute un autre paramètre : une dépression très active qui devrait atteindre le nord-est de l’île, avec 40 nœuds fichiers et des rafales à 50 nœuds. Mer croisée, côte sous le vent et difficulté d’intervention en cas d’avarie… Pour la direction de course, envisager le contournement de l’Islande dans ces conditions était "délicat et dangereux" d’où la décision d’y renoncer. Un nouveau waypoint (point de passage) a donc été placé à 124 milles plus à l’Ouest.
Président de la SAEM Vendée et du Département de la Vendée, Alain Leboeuf évoque "un choix de raison" : "nous ne ferons pas prendre de risques démesurés aux skippers". "Les modèles météo ne cessent de s’aggraver", confirme Francis Le Goff, le directeur de course. Christian Dumard, consultant météo, explique : "la dépression se forme dans le Sud-Ouest de la flotte et va se creuser progressivement vers le Nord-Est de l’Islande".
Malgré cette décision empreinte de prudence, la flotte s’apprête donc à faire face à de fortes turbulences dans les prochains jours. "Dans un premier temps, des vents forts dans la partie Sud de la dépression pourraient atteindre 45 à 50 nœuds, poursuit Christian Dumard. Dans la journée de samedi, un courant de vent de Nord-Ouest va se renforcer avec des rafales entre 40 à 45 nœuds, le long du relief, entre l’Islande et la dépression".
"L’expérience n’empêche pas d’avoir peur"
Pour les skippers, l’appréhension est palpable. Isabelle Joschke, qui a retrouvé du vent au cœur de la flotte, assure avoir les yeux "rivés sur les fichiers météos depuis trois jours". "Il va bien falloir redescendre après avoir passé le waypoint et ce sera difficile à gérer", confie la navigatrice de MACSF. Et elle ajoute : "si l’expérience aide, ça n’empêche pas d’avoir peur".
Pendant ce temps-là, la course continue et les équilibres s’affinent, d’autant que pour une grande majorité d’entre eux, la pétole n’est plus qu’un lointain – et mauvais – souvenir. En tête, Charlie Dalin (APIVIA) a pris la poudre d’escampette. Il compte désormais un peu plus
de 77 milles d’avance sur Jérémie Beyou (Charal), 105 milles sur Thomas Ruyant (LinkedOut) et 131 milles sur Benjamin Ferré (Monnoyeur - Duo For A Job) qui s’accroche encore au podium.
Le reste de la flotte s’étire sur 370 milles. Plus à l’ouest, trois concurrents sont à la latitude des côtes écossaises : Antoine Cornic (EBAC Litterie, 6e), Louis Duc (Fives - Lantana Environnement, 7e) et Denis Van Weynbergh (Laboratoires de Biarritz, 4e). La zone de molle dans laquelle ils sont englués devrait progressivement se résorber, leur permettant de revenir sur leurs camarades de l’Ouest. "Il y a un petit labyrinthe à trouver jusqu’à l’Islande", résume Louis Duc qui assure "s’éclater à bord". Ainsi va le quotidien à la Vendée Arctique - Les Sables d’Olonne avec la conviction, plus forte de jour en jour, que les certitudes n’existent décidément jamais au large.