Isabelle Autissier, amoureuse du Grand Nord
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Isabelle, comment avez-vous découvert l’Islande ?
Isabelle Autissier : C’était il y a quelques années, sur ma route entre l’Écosse et le Groenland. Je m’étais arrêtée dans le coin Nord-Est. Comme beaucoup, j’ai trouvé le pays magnifique. L’an dernier, j’ai décidé d’y passer un peu plus d’un mois en faisant le tour par le nord. J’ai laissé le bateau à côté de Reykjavik.
Vous connaissez bien les mers du Sud. Pourquoi avoir décidé de mettre le cap au Nord ?
Isabelle Autissier : Pour changer de crèmerie (rires). J’ai effectivement passé huit ans avec le bateau basé à Ushuaïa, j’ai pas mal écumé la Patagonie, l’Antarctique, les îles Australes. J’aime bien le froid. Le nord, je connaissais très peu. Maintenant, je suis davantage entre le Spitzberg, le Groenland, l’Islande. Ce sont d’autres découvertes, ce n’est pas le même environnement, ce n’est pas la même glace et ça me plait de découvrir ces différences.
« En Islande, il faut naviguer prudemment »
Quelles sont les spécificités de la navigation aux abords de l’Islande ?
Isabelle Autissier : C’est un endroit où il y a beaucoup de courants et d’effets de côtes qui peuvent être très violents. Si on a une situation d’anticyclone avec tout d’un coup de l’air très froid qui tombe comme cela peut arriver en Antarctique, en 30 minutes on peut avoir 50 nœuds de vent. En Islande, il faut naviguer prudemment et être très attentif. Autre difficulté : le pays est finalement assez mal cartographié, à part les entrées de port, il faut faire attention où on met les pieds. Cela m’arrive régulièrement, comme je le faisais en Antarctique, d’envoyer l’annexe avec un sondeur à main pour savoir par où je peux passer. L’approche des fjords est extrêmement compliquée. Il y a beaucoup de brouillard aussi. Entre l’Ecosse et le Groenland, j’ai déjà passé 12 jours sans rien voir.
La Vendée Arctique-Les Sables d’Olonne s’est finalement terminée à la porte située dans l’Est de l’Islande, pour épargner les marins et leurs bateaux face à une dépression majeure. Comment savoir où placer le curseur entre compétition et sécurité ?
Isabelle Autissier : Il y a un principe de précaution. Ces choix ne sont jamais faciles. La limite dépend des bateaux (qui sont plus ou moins prêts) et des marins (qui sont plus ou moins expérimentés). La navigation, c’est un questionnement permanent pour déterminer où on en est en fonction de l’état de son bateau, de sa forme physique, des conditions météo rencontrées… Cela peut amener à agir en bon marin. C’est un choix individuel. Mais la direction de course doit prendre des décisions pour tout le monde et j’imagine qu’elle se base sur les plus “fragiles”. Il ne faut pas oublier que la course au large est un jeu, et un jeu ne vaut pas la peine de mettre sa vie en cause.